Le SIDA a été découvert en 1981 en Californie à la suite d’une épidémie rare d’infection pulmonaire par Pneumocystis carinii (actuellement Pneumocystis jirovecii) chez des hommes homosexuels qui semblaient en bonne santé auparavant. En 1983 le virus sera identifié par les français Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi, et nommé LAV (lymphadenopathy associated virus), tandis que le groupe de Robert Gallo persistera à utiliser le nom HTLV-III. Un accord franco-américain permettra de s’entendre sur le nom Human Immunodeficiency Virus (HIV ou VIH en français).
Les virus qui causent le syndrome d'immunodéficience acquise ou SIDA appartiennent à la famille des Retroviridae, genre Lentivirus. Il existe 2 types de virus de l'immunodéficience humaine (VIH): VIH-1 et VIH-2. Ils ont globalement 42 % d'identité génétique. Les deux virus sont en outre classés en nombreux groupes et sous-types. Le groupe principal parmi les VIH-1 est le groupe M, qui a évolué vers de nombreux sous-types et types recombinants. Les lentivirus sont des virus enveloppés, possédant 2 molécules d'ARN monocaténaire identiques (le virus est diploïde) associées à l’enzyme polymérase, transcriptase inverse ou ‘Reverse Transcriptase’ (RT), qui copie l'ARN viral en ADN double brin. L'ADN double brin est ensuite intégré dans le génome cellulaire, via une seconde enzyme, l’intégrase. L'ADN viral intégré dans le génome cellulaire porte le nom de "provirus". Le génome des virus VIH-1 et VIH-2 a la structure générale du génome des retrovirus : le provirus (voir plus loin) est flanqué par deux zones répétitives, les LTR (long terminal repeat), il possède les gènes structuraux gag (« group antigen »), pol (« polymerase ») et env (« envelope »), ainsi qu’un certain nombre de gènes codant pour des protéines non-structurales, les plus importantes étant Tat et Rev.
V.1.1. Arbre phylogénétique
Cette figure illustre le fait que les virus VIH-1 et VIH-2 ont des origines mèlées à celles des SIV simiens et forment plusieurs groupes. Cela indique qu’ils sont issus de plusieurs transmissions du singe à l’homme. Le groupe le plus important du VIH-1, responsable de la pandémie actuelle, est le groupe M. Celui-ci s’est divisé en de multiples sous-types au cours de l’évolution chez l’homme. Le sous-type dominant aux EU et en Europe est le sous-type B, bien qu’en Belgique de nombreux sous-types soient présents. Les différents sous-types ont donné naissance à des formes recombinantes appelées CRF (circulating recombinant forms). Le VIH-2 est issu de deux transmissions indépendantes à partir d’un foyer simien, donnant les groupes A (le plus commun) et B.
V.1.2. Structure du génome pro-viral
V.1.3. Cycle viral du VIH
Cliquez sur les différents chiffres pour voir le détail de la partie du cycle concerné.
Le récepteur principal des VIH est la molécule CD4, présente à la surface de certains lymphocytes T, de monocytes/macrophages et de cellules dendritiques. Ces virus reconnaissent également des récepteurs accessoires CCR5 et CXCR4, qui sont des récepteurs de chimiokines. La liaison avec ces récepteurs va permettre la fusion entre la membrane du virus (l'enveloppe) et la membrane cellulaire. Au début de l’infection, ce seront surtout les virus reconnaissant le CCR5 (virus R5) qui seront présents. Ils sont capables de reconnaître préférentiellement les macrophages et les cellules dendritiques, ainsi que certaines populations de lymphocytes comme les lymphocytes mémoires. Les virus reconnaissant le CXCR4 (virus X4), qui sont essentiellement lymphotropes, apparaissent plus tard lorsque l’infection évolue vers le SIDA. Ces virus X4 induisent des syncytia dans certaines lignées cellulaires et furent appelés « syncytium inducing »(SI). Il existe des virus reconnaissant les deux types de corécepteurs. Ces virus sont appelés R5/X4.Les VIH ont comme caractéristiques essentielles de détruire les cellules qu'ils infectent, de posséder un grand nombre de gènes régulateurs et de présenter une très grande variabilité génétique. Ils se présentent comme quasi-espèce chez les personnes infectées.
http://www.who.int/hiv/fr/ Les VIH sont transmis par le sang et ses dérivés, par contact sexuel et par passage de la mère à l'enfant. Le VIH-1 a une diffusion mondiale et le VIH-2 une diffusion surtout restreinte à l'Afrique de l'Ouest. Dans les pays occidentaux les groupes les plus exposés sont les homo- et bisexuels masculins et les toxicomanes par voie intraveineuse, ainsi que les migrants provenant d'Afrique sub-saharienne. Dans les pays en voie de développement, la transmission hétérosexuelle est dominante. La Belgique connaît une situation intermédiaire, où la transmission homosexuelle est devenue la plus fréquente (voir figure V.1.4 et rapport de l'institut scientifique de santé publique à www.wiv-isp.be). Bien que l'incidence du VIH tend aujourd'hui à diminuer, la prévalence de l'infection augmente car l'espérance de vie des patients infectés a augmenté grâce aux traitements. Malgré ces avancées thérapeutiques, le dépistage reste problématique : on estime qu'à l'échelle mondiale, plus de 45% des personnes infectées ne connaissent pas leur statut. En Belgique, ce chiffre est proche de 20%.
V.1.4. Evolution des diagnostics VIH des patients belges par mode probable de transmission (1995-2014)
Source : l'ISP en novembre 2015.
HSH = hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes.
Les pays en voie de développement sont de loin les plus touchés. L'allaitement maternel peut permettre la transmission du VIH. Il semble cependant que celle-ci serait plus importante lors d'un allaitement mixte (maternel/artificiel) et que l'allaitement mixte favorise la survenue de diverses autres maladies infectieuses. Pour cette raison il est actuellement admis que dans les circonstances d'un pays en voie de développement il faut recommander un allaitement maternel intégral pendant les 6 premiers mois de vie, si il est accompagné d'un traitement antirétroviral efficace. Le traitement de la mère dans cette période réduit fortement la transmission.
Au cours de la primo-infection, on assiste à une déplétion importante du nombre de lymphocytes CD4 au niveau des muqueuses, principalement au niveau de la muqueuse intestinale. L’altération de l’immunité locale au niveau du tube digestif augmenterait la translocation de composants bactériens, résultant en une activation accrue du système immunitaire (différenciation et activation des lymphocytes, inflammation).
Les VIH sont responsables d'un syndrome qui se caractérise par la disparition lente et inéluctable des lymphocytes CD4+, aboutissant au SIDA ou syndrome d'immunodéficience acquise, dont la durée d'incubation naturelle moyenne est estimée à 8 ans. La durée d’incubation est actuellement fort prolongée grâce au traitement.
La primo-infection passe souvent inaperçue. Dans 30 % des cas elle s'accompagne d'un syndrome clinique s'accompagnant de fièvre ou d'une maladie ressemblant à la mononucléose infectieuse.
Fréquence typique des différents symptômes lors d’une primo-infection symptomatique | |
---|---|
Fièvre |
96 % |
Adénopathie | 74 % |
Pharyngite | 70 % |
Exanthème | 70 % |
Myalgie | 54 % |
Diarrhée | 32 % |
Mal de tête | 32 % |
Nausées et vomissements | 27 % |
Hépato-splénomégalie | 14 % |
Perte de poids | 13 % |
Muguet | 12 % |
Symptômes neurologiques | 12 % |
Les anticorps apparaissent de 3 à 12 semaines après l'infection. Ensuite s'installe un état de portage asymptomatique. Une variété de symptômes vont survenir après un temps variable et traduire la détérioration clinique et l'immunodépression (dans le temps, ceci était appelé « AIDS related complex » ou ARC) : diarrhée, fièvre, amaigrissement, lymphadénopathies. La survenue d'infections opportunistes, du sarcome de Kaposi ou d'autres tumeurs malignes, indiquant une diminution des défenses immunitaires, signe l'entrée dans le SIDA. Ceci correspond au stade C du CDC américain (tableau 2 des pathologies apparaissant à la demande). D’autre pathologies, non indicatives du SIDA, peuvent survenir tels des dysplasies cervicales, des épisodes de zona ou une candidose buccale: elles signent le stade B. (tableau 1 des pathologies apparaissant à la demande).
Classification des cas d'infection par VIH | |||
Catégories cliniques (cases grisées : indication de traitement spécifique anti-VIH) |
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A | B | C* | |
Nombre de lymphocytes CD4 | Asymptomatique Lymphadénopathie Infection aiguë VIH |
Symptomatique (ni A ni C) Voir tableau 1 |
Maladie indicative de SIDA Voir tableau 2 |
> 500/mm³ | A1 | B1 | C1 |
200 à 499/mm³ | A2 | B2 | C2 |
< 200/mm³ | A3 | B3 | C3 |
* Un patient entrant dans le stade C y restera même après guérison de sa maladie indicative de SIDA.
Tableau 1 : maladies indiquant un stade CDC B incluent toute maladie en rapport avec l’infection HIV, non incluse dans la définition du stade C.
Tableau 2 : maladies définissant le stade CDC C (si liées à la présence du VIH ou compliquées par la présence de celui-ci).
V.1.5. Evolution de l’infection.
A peu près 3 semaines après une infection apparaît l’antigène p24 (Ag p24) dans le sang, précédé de quelques jours de l’ARN viral. Les anticorps sont généralement présents endéans les 6 semaines. Après la phase aigue il y a une longue phase de latence clinique, accompagnée d’une persistance de l’ARN viral, dont la concentration (charge virale) descend à un plateau plus faible qu’en phase aiguë, pour augmenter à nouveau lorsque l’évolution vers les manifestations cliniques se fait. L’antigène, détectable au début, devient indétectable ensuite pour réapparaître vers la fin. Les anticorps sont le signe d'infection le plus constant et le plus facilement décelable, par exemple par ELISA ; ils sont présents à vie. Au cours de l’évolution il y a une diminution progressive du taux de lympocytes CD4+.
Sans traitement, les effets physiopathologiques les plus marquants de l'infection par le VIH sont liés à l'immunodéficience, le stade SIDA entraînant la mort du patient. Depuis la disponibilité de traitements efficaces, l'espérance de vie prolongée à rendu possible l'observations de manifestations pathologiques non-liées au SIDA. Ces phénomènes sont responsables d'une mortalité précoce des patients positifs par rapport à la population générale, même si un traitement antirétroviral efficace est administré.
L’infection VIH va perturber l’organisation des tissus lymphoïdes, particulièrement au niveau des muqueuses. La déplétion du nombre de lymphocytes T va entraîner une modification de l’architecture tissulaire, et une perturbation de l’équilibre entre les populations cellulaires régulant la réponse inflammatoire. En conséquence, le patient infecté se trouvera dans un état d’activation chronique du système immunitaire, favorisant la réponse inflammatoire par libération de cytokines. La présence de marqueurs biologiques de l’inflammation dans le sérum sont augmentés, et on note la présence de LPS, endotoxine bactérienne : au niveau de la muqueuse digestive, la translocation de bactéries de la flore commensale digestive au travers de l’épithélium perturbé favorise aussi la réponse inflammatoire.
Cet état va augmenter la survenue de complications métaboliques, incluant un risque accru d'accidents cardio-vasculaires, de diabète, d'insuffisance rénale et hépatique, d'ostéoporose et de troubles neurologiques. Le développement de cancers, non-liés au stade SIDA, est également plus fréquent.
De façon générale, l'inflammation chronique aura pour effet sur le patient un vieillissement prématuré, comme l'attestent la présence de marqueurs de sénéscence. Ce concept est repris sous le terme anglo-saxon d' "inflammaging".
Chez l'adulte, le diagnostic est sérologique et nécessite un test de dépistage (généralement ELISA) pour la recherche des anticorps puis un test de confirmation (type Western Blot). Le test est généralement positif dans les 3 à 6 semaines suivant une contamination et certainement dans les 3 mois. La détection de l'antigène p24 libre circulant dans le plasma ou le sérum peut être intéressante en cas de suspicion de primo-infection. Actuellement les tests de dépistage de 4ème génération combinent la recherche d'anticorps et d'antigène p24. Ceci permet un résultat positif dans les deux à trois semaines. L'ARN viral plasmatique est le premier marqueur biologique détectable lors d'une primo-infection, il peut également être utile en cas de suspicion de primo-infection.
La détection, par PCR, d'ADN proviral intégré dans les cellules mononucléées du sang (lymphocytes et monocytes) est une technique très sensible et spécifique. Une application importante du dépistage des provirus par PCR est le diagnostic chez l'enfant. En effet, celui-ci peut avoir des anticorps maternels jusqu'à 15 mois, compliquant la détection sérologique de l'infection.
La quantification d'ARN viral (on parle de charge virale) par RT-PCR dans le plasma permet de suivre les patients sous traitement et d'évaluer le risque de progression et de transmission.
Il est également possible de rechercher la résistance du VIH aux produits antiviraux ; la technique la plus utilisée dans ce cadre est le génotypage : par définition de la séquence nucléotidique codant pour les protéines cibles (transcriptase inverse, protéase, intégrase) on recherche des mutations entraînant la résistance. Le suivi régulier de la concentration en lymphocytes CD4+ permet d’évaluer l’état du système immunitaire du patient.
En Belgique, il existe un système de laboratoire de référence SIDA (LRS). De tels LRS sont chargés de confirmer tous les diagnostics positifs effectués par les autres laboratoires. Cette confirmation est absolument nécessaire car la valeur prédictive est relativement faible dans notre population, à cause de la faible prévalence, et l’importance du diagnostic nécessite une sûreté absolue. Lorsqu'un patient est trouvé positif et que cela a été confirmé par un LRS, il est impératif de répéter le test sur un échantillon de sang indépendant avant d’en aviser le patient, ceci afin d’éviter toute erreur administrative ou expérimentale. Les LRS sont également chargés d’effectuer les tests de suivi (charges virales et génotypes).
Des tests rapides, basés sur la recherche d'anticorps dans la salive ou dans une goutte de sang, peuvent être effectués en quelques minutes. Certains sont disponibles en "auto-test" réalisé par le patient. Leur sensibilité reste plus faible que les tests ELISA de 4è génération : leur interprétation correcte peut nécessiter des tests complémentaires en laboratoire.
Les mesures préventives prises contre la transmission iatrogène comprennent la détection des anticorps chez les donneurs de sang, de sperme et d'organe, et l'inactivation des pools plasmatiques utilisés pour la préparation des dérivés sanguins. La prévention de la transmission sexuelle implique implique plusieurs approches, dont la promotion des préservatifs et de la fidélité à un partenaire sain. Pour être efficaces, ces mesures doivent être incluses dans une éducation à la santé. Les différentes personnes devraient avoir connaissance de leur statut VIH (infecté ou non) en cas de comportement à risque présent ou ancien. La large disponibilité de tests de dépistage, que nous connaissons en Belgique, rend cela facile. Même si le nombre de tests de dépistage effectués est élevé comparé à d'autres pays, environ 20% des personnes infectées ignorent leur positivité. Pour empêcher la transmission de la mère à l’enfant, l’essentiel est de traiter la mère pour diminuer sa charge virale. Le développement d'un vaccin est en cours d'étude, avec peu de résultats pour l’instant.
Le traitement antirétroviral est envisagé comme moyen de prévention à 3 niveaux différents.
V.1.6. Action des médicaments.
Médicaments anti-VIH actuellement disponibles en Belgique :
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Nom générique |
Nom commercial |
Abréviation |
Analogues de nucléosides inhibiteurs de la transcriptase inverse (NRTI) |
Abacavir |
Ziagen® |
ABC |
Didanosine |
Videx® et |
ddI |
|
Lamivudine |
Epivir® |
3TC |
|
Stavudine |
Zerit® |
d4T |
|
Zidovudine |
Retrovir® |
ZDV (AZT) |
|
Zidovudine + lamivudine |
Combivir® |
ZDV + 3TC |
|
Zidovudine + lamivudine + abacavir |
Trizivir® |
ZDV+3TC+ABC |
|
|
Abacavir + lamivudine |
Kivexa® |
ABV+3TC |
|
Emtricitabine |
Emtriva® |
FTC |
Analogue de nucléotide (NtRTI) |
Tenofovir disoproxal fumarate |
Viread® |
TDF |
Tenofovir alafenamide* |
/ |
TAF |
|
Inhibiteurs non-nucléosidiques de la transcriptase inverse (NNRTI) |
Efavirenz |
Stocrin® |
EFV |
Nevirapine |
Viramune® |
NVP |
|
Etravirine |
Intelence® |
ETV |
|
Rilpivirine |
Edurant® |
RPV |
|
Inhibiteurs de la protéase (PI) |
Saquinavir |
Invirase® |
SQV |
Indinavir |
Crixivan® |
IDV |
|
Lopinavir/Ritonavir |
Kaletra® |
LPV/r |
|
Fos-amprenavir |
Telzir® |
FPV |
|
Atazanavir |
Reyataz® |
ATV |
|
Tipranavir |
Aptivus® |
TPV |
|
Darunavir |
Prezista® |
DRV |
|
Darunavir + Cobicistat |
Rezolsta® |
DRV + COBI |
|
Inhibiteur de fusion |
Enfuvirtide |
Fuzeon® |
T20 |
Antagoniste du CCR-5 |
Maraviroc |
Celsentri® |
MVC |
Inhibiteur de l’intégrase |
Raltegravir |
Isentress® |
RAL |
Elvitegravir |
EVG |
||
Dolutegravir |
Tivicay® |
DTG |
|
Combinaison de molécules de différentes classes |
Tenofovir + emtricitabine |
Truvada® |
TDF + FTC |
Tenovovir + Emtricitabine + Efavirenz | Atripla® | TDF+FTC+EFV | |
Tenofovir + Emtricitabine + Rilpivirine | Eviplera® | TDF+FTC+RPV | |
Tenofovir + Emtricitabine + Elvitegravir + Cobicistat |
Stribild® |
TDF+FTC+EVG+COBI |
|
Abacavir + Lamivudine + Dolutegravir | Triumeq® | ABC+3TC+DTG | |
"Booster" pharmacocinétique |
Ritonavir | Norvir® | RTV ou /r |
Cobicistat |
Tybost® |
COBI |
Historiquement, la première approche utilisée dans le traitement de l'infection par le virus du SIDA a été le développement de molécules capables d'interférer avec le fonctionnement de la transcriptase inverse, une enzyme nécessaire pour la réplication virale, absente des cellules non-infectées.
L'AZT ou Zidovudine, inhibiteur de la RT, est la première molécule ayant démontré son efficacité, en allongeant la durée de survie des patients atteints de SIDA. Il s'agit d'un analogue de nucléoside. (Note : des antiviraux actifs sur d'autres familles de virus possèdent également une structure de nucléoside). Ensuite d’autres inhibiteurs nucléosidiques de la RT (NRTI) ont été développés, suivis d’inhibiteurs non nucléosidiques de la RT (NNRTI) et d’inhibiteurs de la protéase (PI). Un cas particulier est le tenofovir, un analogue de nucléotide (NtRTI), qui est un phosphonate, mimant un ribose monophosphate. Les PI s'utilisent en association avec le ritonavir ou la cobicistat, "boosters" pharmacocinétiques qui permettent d'optimiser les taux plasmatiques du médicament. En 2003 un inhibiteur de la fusion des membranes par interférence avec la glycoprotéine transmembranaire du virus est entré en pratique clinique (T20 ou Fuzeon®). Une autre approche actuelle est l’utilisation de produits bloquant le co-récepteur nécessaire à la fusion des membranes, le CCR5. L’utilisation de ce dernier produit est limitée à l'inhibition des virus R5. La dernière approche ayant mené à de nouveaux médicaments, est le blocage de l’intégrase, enzyme nécessaire à l’intégration de l’ADN proviral dans l’ADN chromosomique de la cellule. Les inhibiteurs de l'intégrase (INI) utilisés actuellement en clinique sont des inhibiteurs du transfert de brins. (Fig. V.1.6). Dans le traitement actuel, on associe d’emblée 3 ou 4 antiviraux (Highly Active AntiRetroviral Therapy = HAART ; ou combined AntiRetroviral Treatment = cART). La combinaison de départ inclut toujours deux NRTI (ou NtRTI) associés à un INI, ou associé à RPV (NNRTI) ou DRV (PI).
Le traitement antirétroviral va permettre l’arrêt de la réplication virale, qui sera matérialisé par une charge virale indétectable dans les prélèvements sanguins. En conséquence, le système immunitaire du patient va pouvoir se reconstituer, ce qui se mesurera en clinique par une hausse progressive du nombre de lymphocytes CD4 circulants.
Néanmoins, plusieurs difficultés sont liées au traitement :
Les nouvelles molécules ont permis aujourd’hui de réduire les toxicités, de réduire le nombre de prises par jour, et elles ont été conçues de telle sorte qu’elles soient actives sur les souches résistantes aux médicaments de première génération. Mais comme le traitement du VIH est devenu efficace pour contrôler la maladie sur le long terme, le problème clinique de beaucoup de patients est dorénavant dominé par les effets secondaires du traitement administré à vie, la gestion des complications métaboliques liées à l’infection, et par la co-évolution d’une infection chronique concomitante telle l’hépatite B ou l’hépatite C. La survenue des complications définies plus haut restent donc d’actualité, même avec les traitements les plus récents.
Les recommandations d’usage en Europe pour l’instauration d’un traitement antirétroviral, et la gestion de ses complications, sont disponibles sur le site www.eacsociety.org à la rubrique “guidelines”. Depuis 2015, il existe un consensus international pour recommander le traitement à tous les patients, quelque soit le stade d'évolution de l'infection ou le taux de CD4 sanguin. Le traitement est envisagé dès que la patient descend sous le seuil de 500 CD4/mm3 ou si d'autres circonstances cliniques l'exigent (grossesse, hépatite virale chronique par exemple).
Chez la femme enceinte séropositive VIH, le traitement administré à partir du deuxième trimestre de la grossesse diminue fortement la probabilité de transmission du virus à l’enfant. Si la charge virale plasmatique de la mère est indétectable, c’est-à-dire que la réplication du virus est parfaitement contrôlée par le traitement, le risque de transmission se rapproche de 0 contre 30% environ sans traitement.
A titre prophylactique, un enfant né de mère séropositive sera traité durant le premier mois de sa vie. Chez l'enfant infecté, les recommandations varient suivant les groupes d'experts et les moyens disponibles mais le traitement se fera habituellement d'emblée avant l'âge de un an. Le nombre de combinaisons médicamenteuses possibles est plus réduit par rapport à l'adulte, essentiellement parce que peu d'études cliniques ont été réalisées chez l'enfant, et par manque de formulations appropriées (dosage adéquat, formulation en sirop, palatabilité).
(Note : Séquençage et principe de la phylogénie" où une application sur le VIH sera développée.(en élaboration)).